EUROPA
Un séminaire organisé à Saint-Vincent le 28 avril dernier a permis d'établir une comparaison entre le projet de Convention-cadre enropéenne des régions de montagne et la Convention alpine.
UNE CONVENTION CADRE POUR LA MONTAGNE
par Fausto Ballerini
Le 28 avril dernier, la Présidence du Gouvernement valdôtain, en collaboration avec l'Assemblée parlementaire et le Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux du Conseil de l'Europe (CPLRE), a organisé, à Saint-Vincent, un séminaire sur le "Projet de Convention-cadre européenne des régions de montagne.
Les participants, parmi lesquels figuraient des experts nationaux en provenance des pays intéressés, ont examiné la politique spécifique des régions de montagne et souligné l'importance de la mise en place d'un instrument juridique international pour leur développement durable. L'adoption d'une convention-cadre est considérée par les régions de montagne comme la reconnaissance de leur droit de citoyenneté en Europe tout en étant un instrument indispensable pour faire face à la mondialisation.
Le projet de Convention-cadre européenne des régions de montagne est issu de la proposition de Charte européenne des régions de montagne arrêtée par le groupe de travail compétent, Charte qui prévoyait l'adoption de mesures juridiques, administratives, fiscales, économiques et financières, ainsi que de politiques sectorielles présentant un intérêt direct pour les régions de montagne.
Les réactions politiques vis-à-vis du projet de Charte Européenne ont été particulièrement favorables. Le 21 avril 1995, le Comité des Régions de l'Union Européenne avait arrêté, à la plus large majorité, un Avis d'initiative portant sur ce projet. Il avait également considéré la Charte comme "un outil particulièrement favorable au renforcement de la démocratie locale, compte tenu de la place importante quelle accorde aux pouvoirs locaux pour concevoir et animer une politique en faveur des zones de montagne". En mai 1995, le CPLRE avait approuvé la Charte européenne des régions de montagne et voté la Recommandation 14 (1995) invitant le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe à examiner le projet de Charte en vue de son adoption. L'Assemblée Parlementaire du Conseil de l'Europe, pour sa part, avait concrétisé son soutien formel à la Charte, par la Recommandation 1274 du 27 juin 1995.
De nombreux pays d'Europe occidentale comptant des zones de montagne ont depuis longtemps adopté des politiques de soutien à l'économie de montagne ainsi qu'à la protection de l'environnement et de la culture. A' ce propos, les intervenants au séminaire de Saint-Vincent, ont affirmé que l'adoption et la ratification, sous forme conventionnelle, de cet instrument, ne feront que sanctionner des choix et des orientations de gouvernement déjà établis. La Convention-cadre des régions de montagne est considérée, par les parties proposantes, comme un instrument concret pour répondre à une globalisation économique qui ne cesse de conférer à l'aménagement du territoire une position toujours plus centrale pour assurer un développement durable à long terme.
Une intéressante comparaison de la Convention-cadre européenne des régions de montagne et de la Convention alpine a été faite par Mme Mary Sancy, Professeur de droit de l'environnement à l'Université Fondation Universitaire Luxembourgeoise.
La relation de Mme Sancy met en évidence que ces deux textes ne doivent pas être conçus comme antagonistes mais seulement comme "différents" dans leur perception du phénomène "montagne" et dans la mise en oeuvre des politiques spécifiques. Si la Convention Alpine ne s'applique qu'aux Alpes, le projet de Convention cadre définit les paramètres de "région de montagne" et renvoie aux Etats signataires la tâche de définir le cadre d'application.
Au-delà des différences, les deux conventions présentent, selon Mme Sancy, une véritable complémentarité. A long terme, les objectifs de protection de la Convention Alpine rejoignent les objectifs de développement et le projet de Convention Montagne prévoit également le maintien des principaux biotopes, l'extension des zones protégées, l'extension des études d'impact et la réduction du trafic.
Plus précisément, le projet de Convention Montagne est une convention-cadre qui traduit en termes politico-juridiques la demande sociale croissante de lignes directrices pour les régions de montagne en vue d'atteindre un développement harmonieux dans un environnement particulièrement fragile. Elle fait référence, dans ses annexes, aux différentes politiques sectorielles concernées.


COMPARAISON DES OBJECTJFS

La Convention Alpine prend en compte simultanément trois aspects du droit de l'environnement alpin: la compatibilité des activités en montagne avec la protection de l'environnement, la valeur environnementale et patrimoniale des milieux naturels d'altitude, le développement des recherches et des observations scientifiques sur l'ensemble de l'arc alpin.
L'alinéa 2 de l'article premier de la Convention Alpine résume à lui seul ses objectifs et ses fondements. "Les parties contractantes, dans le respect des principes de précaution, du pollueur payeur et de coopération, assurent une politique globale de préservation et de protection des Alpes en prenant en considération de façon équitable les intérêts de tous les états alpins, de leurs régions alpines, ainsi que de la Communauté économique européenne, tout en utilisant avec discernement les ressources et en les exploitant de façon durable. La coopération transfrontalière en faveur de l'espace alpin est intensifiée et élargie sur le plan géographique et thématique."
Ce bref résumé contient nombre de principes qui sous-tendent le droit moderne de l'environnement.
La Convention Montagne, d'autre part, a pour objet de définir un cadre commun axé sur l'intégration de la politique environnementale dans les autres politiques, selon un principe de développement durable, opérant un équilibre entre développement socio-économique, aspects sociaux et exigences écologiques.
Le principe de prévention (obligation de planification, de gestion et de protection) est à la fois à la base de la Convention Montagne et de la Convention Alpine. Pour ces raisons, l'analyse faite dans le cadre du séminaire de Saint-Vincent souligne comme ces deux textes ne sont ni antinomiques, ni contradictoires, mais bien complémentaires dans leurs objectifs. Le projet de Convention Montagne se différencie cependant de la Convention Alpine en ce qui concerne le rôle joué par les autorités locales et régionales qui sont associées à la définition, à l'élaboration et à l'application des mesures de la politique "montagne" dans le respect du principe de la subsidiarité et de la coopération transfrontalière.


LE PROJET DE CONVENTION-CADRE DONNE UNE DEFINITION DE REGION DE MONTAGNE

Si la Convention Alpine définit le domaine d'application de la Convention par le biais d'une description des Alpes, le projet de Convention Montagne établit une définition de la "région montagne". Il faut entendre à cet effet "toute zone dans laquelle l'exercice d'activités humaines est soumis à des conditions spécifiquement liées à l'altitude, à la pente et au climat"; tout Etat pouvant désigner les régions de son territoire qui répondent à ces critères.
L'apport de cette définition est important car elle complète la notion plus restrictive et géographique développée dans le cadre de la Convention Alpine. Le projet de Convention Montagne a donc une vocation plus générale, par rapport à la spécificité de la Convention Alpine.


LA PARTICIPATION DES ACTEURS EST DIFFERENTE ENTRE LES DEUX CONVENTIONS

Incontestablement, la Convention Alpine est le fruit du dynamisme des organismes de protection de la nature réunis au sein de la CIPRA, et plus particulièrement de sa partie germanique. C'est bien à leur invitation que le "cercle du Liechtenstein" fixa les fondements d'un texte de protection soumis en 1989 aux délégations officielles des sept pays alpins.
Dans ce contexte, la génèse même de la Convention a fait que les pouvoirs locaux n'ont pas été associés à la discussion dès le départ.
Au contraire, l'article 3.2 du projet de Convention-cadre des régions de montagne instaure, à titre de principe, la nécessaire association et collaboration avec les autorités locales et régionales qui sont reconnues comme des acteurs fondamentaux de la définition, de l'élaboration et de l'application des mesures adoptées dans le cadre de la Convention.
L'article 4 de la Convention Montagne fait obligation aux parties contractantes d'adopter des instruments appropriés en vue du développement et de la protection des régions de montagne, instruments qui devraient se présenter sous forme de plans et de programmes mis en oeuvre à l'échelon territorial le plus approprié.
Le document figurant en annexe au projet de Convention-cadre opère une distinction entre les orientations qui concernent les différentes politiques sectorielles et celles qui concernent l'adoption de mesures économiques et financières.
Plus précisément, il suggère que ces dernières prennent la forme d'aides directes, d'incitations fiscales ou, éventuellement, de rémunérations au titre des prestations effectuées en vue de la protection et de gestion de 1'environnement ou de la prévention des risques naturels, sans omettre la possibilité de contributions visant à compenser des handicaps naturels ou des contraintes écologiques, ou encore de systèmes de péréquation fiscale en faveur des régions les moins favorisées.
Les orientations concernant les différentes politiques sectorielles concernées couvrent plusieurs aspects:
· diversité économique et pluriactivité;
· agriculture et sylviculture;
· industrie, artisanat, commerce et services privés;
· tourisme;
· logement, cadre de vie et infrastructures;
· transports;
· énergie;
· environnement;
· éducation et formation;
· culture;
· coopération scientifique et technique.

Sans doute, ces orientations laissent transparaître une vision moderne et actuelle des politiques intégrées en faveur des zones de montagne.
Ce projet de Convention vise à assurer aux zones de montagne un développement économique permettant à leurs populations de vivre et de travailler en montagne, en leur assurant des conditions et un niveau de vie comparable aux autres régions. Cet instrument, une fois ratifié, aura valeur de traité international, tout comme la Convention Alpine, mais son champ d'application est différent. Il concerne des territoires européens de montagne, faisant de la Convention Alpine un simple sous-ensemble. Les objectifs du projet de Convention sont simples: une politique d'aménagement ménageant le développement et le maintien des populations, la réduction des disparités régionales, le maintien des services et des activités nécessaires, la préservation des valeurs culturelles et environnementales.
Le projet de Convention Montagne définit avec précision le concept de montagne, ce qui permettrait à la position de l'Union Européenne de s'affiner. En effet, jusqu'à présent, la Commission a toujours refusé de voir dans la montagne autre chose que des zones agricoles défavorisées. La signature de la Convention
Montagne par l'Union européenne devrait donc modifier la perception communautaire.
Avec l'organisation du séminaire de Saint-Vincent, la Région Autonome Vallée d'Aoste a voulu contribuer à l'effort de finalisation de la Convention-cadre, pour exammer et réfléchir davantage sur ce texte à soumettre à l'attention de la Conférence Européenne des Ministres responsables de l'Aménagement du Territoire, qui se tiendra à Hanovre, les 7 et 8 septembre 2000.
A l'issue de ce séminaire, le Groupe de travail "Nouvelles perspectives de la politique de l'aménagement du territoire et des transports" du CPLRE a rediscuté et amendé le texte du projet de Convention mettant l'accent sur la nécessité, de la part des Etats membres signataires de la future convention, de "promouvoir" la coopération intercommunale, interrégionale et transfrontalière.
En ce qui concerne les étapes pour l'adoption du projet de convention, le Groupe de travail a réaffirmé la nécessité d'obtenir une décision du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe à l'issue de la Conférence des Ministres responsables de l'aménagement du territoire de Hanovre. Il a, par ailleurs, écarté toute proposition de reporter de plusieurs années la décision sur le projet de convention.
Suite aux décisions prises par les organes compétents, le Président du Gouvernement Dino Viérin a été nommé rapporteur officiel du projet de Recommandation incluant en son annexe le projet de convention-cadre. La Recommandation a été approuvée à l'unanimité par le Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux de l'Europe lors de la Session plénière qui s'est tenue à Strasbourg les 23-25 mai derniers.
Les mois prochains seront décisifs pour garantir l'essor de cette convention internationale, témoignage du rôle de véritables acteurs politiques que les collectivités régionales et locales veulent jouer sur l'échiquier européen.

   
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