INFRASTRUTTURE IDRICHE
"Sans artifices, pas d'outils pour travailler la terre, pas de clous ou de crochets pour construire les maisons, pas de draps pour se couvrir ou se vĂȘtir, pas de farine pour faire le pain ! "1
DES "ARTIFICES"
par Claudine Remacle
Pierre Perrin (+) au travail au moulin du Petit-Monde (1986).Judicieusement guidée, l'eau fournit une énergie importante qui allège le travail de l'homme, celui qui exige des mouvements répétitifs à force de bras, accomplis jusqu'au bout de la patience et de la fatigue. L'être humain, que l'on critique tant, dont on cherche partout la faute d'exister, qui ne semble plus bon, désormais, qu'à faire des très grosses bêtises, est pourtant génial. Lorsque l'on pose son regard sur les ouvrages hydrauliques qu'il a construits dans les siècles passés, l'admiration jaillit.
Il reste pourtant bien peu de moulins actifs en Vallée d'Aoste, alors qu'il en a existé des centaines. On a calculé qu'à Gressoney-Saint-Jean, en 1835 , il y avait un moulin à céréales pour 50 personnes ; à Arvier, où l'habitat est plus groupé, en 1829, il y en avait un pour 65 personnes. Ils étaient disséminés partout : au creux des vallons, près d'un torrent ou le long des rus, isolés ou en série. Près des cours d'eau impétueux, ils n'ont pas souvent résisté, emportés par les crues ; greffés le long des biefs ou des rus, par contre, ils sont parfois encore là, mais leurs mécanismes ont souvent été démantelés au XIXe siècle et au XXe pour éviter les taxes sur la mouture . Les moulins à céréales sont de petits bâtiments à l'apparence insignifiante, mais ingénieux. Ils mesurent environ 5 mètres sur 5 et, comme leur roue est invisible, aujourd'hui qu'ils ne servent plus à rien, on les ignore souvent.
Scierie hydraulique de Verrogne (Saint-Pierre). Roue verticale et chenal d'adduction d'eau en bois.A part quelques exceptions (à partir du XIXe siècle), les moulins de montagne n'avaient pas de grandes roues à aubes verticales comme les moulins des plaines. Ils n'avaient pas non plus la prestance des moulins à vent garni d'ailes majestueuses ou encore la solidité massive des moulins à marée de Bretagne, isolé, comme des bateaux, au milieu de la mer lorsqu'elle montait. Non, nos moulins traditionnels fonctionnaient avec une simple petite turbine en bois à pales ou à cuillères, placée horizontalement sous la construction. Une courte chute au jet d'eau bien dirigé, amené par un tronc évidé, suffisait à la faire tourner et à actionner la meule mouvante sur la meule dormante à l'intérieur du moulin. Ces turbines ont été remplacées localement par des roues verticales à partir de la fin du XVIIIe siècle, mais surtout au XXe siècle. Les meules supérieures, disques épais en pierre, actionnées par l'axe moteur vertical, servaient à transformer les céréales en farine à pain. D'autres étaient tronconiques, mises en mouvement dans une énorme conche en pierre par un bras en bois fiché dans l'arbre vertical : on les appelait pila ou pista. Elles servaient à décortiquer l'orge pour faire la soupe, à broyer les noix pour faire de l'huile, à briser les fibres de chanvre, …
Mais il existait en Vallée d'Aoste d'autres roues hydrauliques - verticales -qui ont disparu. Elles animaient des mécanismes différents. Des arbres à cames donnaient un mouvement de battements à des battoirs qui foulaient le drap ou à des marteaux-pilons, à des martinets, qui affinaient le fer. Il y avait aussi des bielles-manivelles qui actionnaient le cadre battant vertical des scies à bois ou le bras d'un énorme soufflet pour activer le feu des forges où l'on fabriquait tout l'outillage nécessaire au travail de la terre et à l'artisanat.

Les moulins du Petit-Monde à Torgnon, dessin de Francesco Corni réalisés pour l'exposition d'Architecture rurale qui s'est déroulée à Torgnon en automne 1988, publiés par la Commuauté de Montagne du Marmore (dir. M.-C. Ronc), in "La Valle del Cervino", 1990, p. 22.Notes
1 C. Remacle, Feu les " artifices " au Val d'Aoste, in Actes de la conférence annuelle du Centre d'Etudes francoprovençales. Histoire d'eau, RAVA, Aoste 2002, pp. 77 - 94.
2 A. C. Gressoney-Saint-Jean. Cadastre de révision de 1835.
3 A. C. Arvier, vol. U, doc. 77 e 137, 5/7/1829.
4 Tassa sul macinato: n°4490 du 7 juillet 1868 et tracasseries administratives pour les meuniers au XXe siècle entre les deux guerres.
   
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