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En vacances avec l'Esprit Tsotèn

Profiter d’un agréable séjour estival dans la campagne valdôtaine pour plonger dans ce que notre région a de plus profond et de plus authentique : sa langue. C’est le pari des familles qui ont choisi l’association “ Esprit Tsotèn ” pour leurs enfants.

Au total, 55 enfants ont participé au projet Esprit Tsotèn(1), avec une seule défection, la troisième semaine, justifiée avec présentation de certificat médical.
Ils avaient entre 4 et 11 ans ; 12 âgés de 4 à 6 ans, 37 de 7 à 9 ans, 14 de 10 ans et plus.
Sept enfants ont participé à deux cycles d'activités (chaque semaine constituant un cycle complet) et un enfant à trois cycles ; ce qui porte le nombre total des présences à 64 unités.
Nous tenons à souligner que durant la première semaine nous avons accueilli un enfant porteur de handicap. Sa participation, fortement voulue par l'association, a nécessité un effort d'organisation supplémentaire et l'embauche, à temps partiel, d'un opérateur de soutien dont les frais ont été totalement pris en charge par l'organisation du projet.
Sur le total de 55 enfants, 48 résidaient dans la Communauté de montagne Grand Paradis, sept dans d'autres Communautés. L'enfant provenant de la commune la plus éloignée habitait Monjovet.
Exception faite pour l'excursion à Antey-Saint-André, toutes les activités se sont déroulées à Introd. Les structures et les espaces intéressés (en fonction des programmes et de la météo) ont été les suivants : locaux paroissiaux, salle de gymnastique de l'école, place de la mairie, parc du château, terrain de football. Le programme énoncé dans la présentation du projet a été, dans son ensemble, entièrement respecté.
Les enfants de la deuxième et de la troisième semaines ont eu en outre la possibilité de visiter le château d'Introd, habituellement interdit aux visiteurs.

LES DIFFÉRENTES ACTIVITÉS PROPOSÉES

Groupe Approches
60 heures au total, avec la réalisation de quatre ateliers (un atelier différent chaque semaine). Chaque atelier comptait 15 heures de travail.
Les ateliers ont été animés exclusivement en langue française, avec parfois l'assistance en patois de la monitrice.
La compagnie théâtrale du “ Groupe Approches ” a mis sur pied les activités suivantes :
• Jeux de présentation des enfants
• Jeux de socialisation
• Jeux de reconnaissance de l'espace
• Exercices corporels (contrôle et dissociation de chaque partie du corps, découverte de l'expressivité corporelle)
• Exercices d'écoute d'instruments de percussion (exercices de rythme, solfège corporel)
• Apprentissage de comptines, petites poésies et chansons sur les thèmes faisant l'objet de l'atelier
• Mise en scène et répétitions
• Maquillage des enfants et représentation finale

Le maquillage et les costumes sont la partie la plus divertissante pour les enfants et la plus spectaculaire du point de vue théâtral. Une sorte de récompense jubilatoire pour le travail réalisé.
L'activité a abouti à la réalisation, pour chaque semaine, d'un spectacle différent.
1e semaine. Voyage autour de l'enfance : le bois avec sa faune et sa flore.
2e semaine. Représentation d'un conte ayant pour base les éléments naturels (le vent, la pluie, le soleil, etc.).
3e semaine. Histoire imaginaire de Celtes, donnant une grande place au rythme et aux percussions outre à la gestuelle et à la danse.
4e semaine. L'exposition universelle imaginaire. Basé avant tout sur le corporel et le mouvement, le spectacle prévoyait l'insertion progressive de textes et de chansons liés aux mouvements corporels.
Il s'agissait de sculpture, mime, animaux, cirque, automates.

FENT
(Fédérachon Esport de Noutra Tèra)

16 heures au total. Les activités se sont déroulées en français et en patois. Les moniteurs du FENT ont proposé aux enfants une première approche des quatre jeux traditionnels valdôtains (tsan, fiolet, rebatta et palet). Une attention particulière a été accordée aux jeux de la rebatta et à celui du fiolet, c'est-à-dire aux jeux pratiqués dans la Communauté du Grand Paradis.
Après une petite introduction historique et une courte présentation théorique des jeux, la place a été laissée à l'expérience pratique.
Dans toutes les activités, les enfants ont pu se servir d'outils de jeu adaptés à leur taille.
Il est intéressant de remarquer que, conformément aux indications parvenues après d'autres expériences de ce genre (cours pour enfants dans les écoles primaires), en général, les filles se sont révélées plus adroites que les garçons dans la pratique des sports traditionnels.

Trouveur valdotén
8 heures au total. La langue utilisée pendant le déroulement des activités a été le patois.
Les animateurs ont guidé les enfants à la découverte de l'univers musical à travers quatre lignes maîtresses : le son, les instruments, le chant et la danse.
Le son. Découverte et expérimentation des paramètres sonores : les enfants ont été invités à réfléchir et à reconnaître l'intensité et le ton des sons en s'exerçant avec leur voix (Crier fort, chuchoter ; émettre un son aigu, ou grave, etc.).
Les instruments. Présentation des principaux instruments et leurs paramètres. Comme pour la voix, les enfants ont été sollicités à produire des sons avec des tonalités et des intensités différentes, en utilisant eux-mêmes les instruments disponibles. (Pour présenter les instruments, ainsi que les paramètres du son, les animateurs interrogent les enfants, construisant ainsi le savoir avec des questions stimuli simples qui permettent même aux plus petits de participer à la discussion).
Les chansons. Les enfants ont d'abord répété le texte des chansons proposées, puis ils en ont appris la mélodie. Le texte des chansons était en patois. Les chansons ont été chantées tous ensemble.
La danse. Les danses proposées appartiennent toutes à l'authentique patrimoine culturel des populations de l'arc alpin. Les enfants ont ainsi pu connaître (et expérimenter) la farandole, la ronde ainsi que les danses en couple.

Toutes les activités ont été alternées par des moments de détente, la musique étant présentée comme moment de réflexion, de repos et de sérénité (par exemple, les enfants s'allongent par terre pendant que les musiciens racontent et jouent une berceuse).

Paroisses du Paradis
8 heures au total. L'activité s'est déroulée en français.
À l'aide de pancartes dessinées et d'un jeu de table : “ Martin, le pèlerin valdôtain ”, le prêtre Paolo Curtaz a proposé aux enfants un petit itinéraire ludique, dans le but de leur apporter une première connaissance des personnages qui ont marqué l'histoire culturelle et religieuse des paroisses de notre Vallée (saint Anselme, saint Ours, saint Bernard, saint Grat, Albert Bailly, etc.).

La borna dou djouas
(Parc d'aventures d'Antey-Saint-André)

Tous les mercredis, pendant toute la journée.
• Parcours suspendus : après avoir fait un parcours “ à terre ” encadrés par les moniteurs du centre, les enfants, pourvus d'un équipement certifié (baudrier, casque, double longe, poulie, mousquetons), accompagnés par notre personnel (un adulte pour six enfants), ont expérimenté des parcours différents, en fonction de l'âge et de la prédisposition de chacun.
• Activité de free-climbing : l'activité de varappe, encadrée par des moniteurs brevetés, s'est tenue dans la structure équipée à cet effet.


LES SERVICES

Dès leur arrivée, et jusqu'à l'heure du départ, les enfants ont été pris en charge par la coordonnatrice responsable. Véritable pivot du projet et point de repère constant pour les enfants et les parents, les coordonnatrices ont été choisies sur la base de leurs compétences et de leur parfaite maîtrise des deux langues requises par le projet (français et patois). Pendant tout le déroulement du stage, les coordonnatrices ont été aidées par une stagiaire (moniteur d'enfance) : de langue maternelle française, elle a été choisie pour sa formation dans le domaine pédagogique.

CONCLUSIONS

Compte tenu du caractère novateur de l'initiative (immersion totale en langue française et patoise), de la prudence naturelle que toute expérience nouvelle suscite auprès des parents, et d'un prix d'inscription non négligeable (cela en raison de la qualité du service, de la richesse du programme proposé et du nombre des opérateurs mis en œuvre pour le réaliser), la réponse des familles à cette première édition d'Esprit Tsotèn a été tout à fait positive, recueillant aussi des adhésions en dehors du territoire de la Communauté de montagne “Grand Paradis“.
L'aspect linguistique a été l'un des objectifs fondamentaux de notre projet. Considérant la durée forcément limitée de l'initiative (on ne change pas les habitudes linguistiques des enfants dans l'espace d'une ou deux semaines de stage), notre but a été celui de créer
des occasions de socialisation, d'apprentissage et de jeu, où ces langues - très souvent écartées à l'école (le patois) ou présentées d'une façon contraignante et aseptique (le français) - ont été proposées sous une lumière nouvelle, dans un véritable “bain de langue”. En ce sens, nous pouvons affirmer que notre but a été complètement atteint. En général, les enfants - au début assez hésitants - ont démontré au fil des jours une prédisposition grandissante à communiquer et à interagir en langue, même entre eux.
Dans nos activités, une grande attention a été aussi attachée à l'aspect “ didactique ”. Nous sommes en effet persuadés qu'apprentissage et loisirs peuvent être efficacement conjugués, et cela dans le but d'intégrer les indispensables moments de jeu et d'évasion avec des expériences cognitives enrichissantes et durables (chants, danses, jeux traditionnels, aperçus historiques, etc.). Ainsi, les deux langues, français et patois, ont été utilisées comme des clefs donnant accès à des savoirs spécifiques.
En général, les jeux traditionnels ont été très appréciés. Dans l'ensemble, la petite présentation des personnages historiques valdôtains, effectuée par Monsieur le curé Paolo Curtaz, paraît avoir retenu l'attention des enfants.
Les activités proposées par les “ Trouveur Valdotèn ” ont également fait l’unanimité : d'après le témoignage des parents, même après plusieurs semaines, certains enfants répétaient encore les chansons apprises pendant le stage. Tout cela nous permet d'affirmer que, sur ce point aussi, les buts définis au départ ont été globalement atteints.
En ce qui concerne les activités de pure évasion, nous devons enfin signaler l'excursion au parc d'aventures d'Antey, qui a obtenu un succès extraordinaire auprès des enfants.
À la fin de chaque semaine, un formulaire anonyme a été distribué, afin de connaître le degré de satisfaction des parents et des enfants. Presque la moitié des parents ont rempli la fiche. Le degré de satisfaction par rapport aux services, ainsi que les appréciations pour les activités proposées, sont tout à fait honorables et dépassent même nos attentes initiales.

Pour conclure, même en prenant acte des marges d'amélioration toujours envisageables, notamment en ce qui concerne les temps et les modalités de déroulement de certaines activités, et dont le rôle devra être revu à l'avenir, nous estimons que cette expérience s'est terminée sur un bilan extrêmement positif.
La bonne réussite de ce projet démontre une fois de plus qu'il existe en Vallée d'Aoste une réelle demande de services didactiques et ludiques en langue, et que ce secteur représente de nos jours un domaine à la fois stimulant et sous-estimé, dont les potentialités demeurent encore largement inexploitées.

Une réelle aventure professionelle et linguistique


Quand on m'a proposé de devenir une des coordinatrices de la toute première édition d’Esprit Tsotén, j'étais très flattée : c'était faire partie d'un projet inédit dans le panorama des initiatives estivales, c'était une réelle aventure, professionnelle et linguistique... Au fur et à mesure que le jour-J (28 juin 2004) approchait, l'enthousiasme se transforma en appréhension : c'était quand même ma première expérience en tant que responsable principale de la semaine, une nouveauté pour moi, habituée aux stages dans les écoles ou aux animations de deux-trois heures au maximum... Mais l’angoisse a vite disparu : d'abord parce que, comme on dit en patois, j'étais ‘bien accompagnée’ : depuis le chauffeur de car jusqu'aux ‘pères’ du projet, les membres d’Esprit Valdôtain, qui étaient toujours disponibles pour n'importe quel problème ! Et puis, surtout, il y a le ‘facteur enfant’, je ne le décrirai pas dans le détail aux enseignants qui lisent cette revue, car ils le connaissent bien : c'est la spontanéité, l'énergie, les commentaires logiques et farfelus en même temps, c'est l'enfance, quoi ! Le nombre réduit d'enfants (12 la première semaine, 16 la quatrième) m'a permis d'instaurer des rapports de qualité avec tous les participants, de me rapprocher d’eux. Le tout dans un contexte extraordinaire, le village d’Introd étant un lieu de travail enviable, avec sa campagne, ses couleurs (si ce n’est la route fréquentée par un nombre incalculable de camions...). Dommage pour certains enfants allergiques aux fourrages, les promenades auraient été fantastiques... Le temps était largement occupé par les nombreuses activités prévues. Heureusement, et je parle aussi au nom de Lisa, notre stagiaire bretonne, nous avions les pauses de midi et le moment du goûter pour jouer, parler avec les enfants. En quelle langue ? Personnellement j'alternais mon patois (de Gressan) avec le français. Et sur ça, je reviens au ‘facteur enfant’ : aucun problème de compréhension, elle était très, très bonne ! Certes, parfois il y avait des choses à préciser, surtout au niveau des règles de conduite et de sécurité ! Mais je suis satisfaite car j'ai remarqué que les enfants, ayant eux-mêmes des parents patoisants, mais avec lesquels ils ne prononçent pas un mot de francoprovençal, s'adressaient à moi en patois ! Pas de grands discours, mais de petites phrases avec des mots bien connus puisqu'ils appartiennent à leur vécu, mais qu'ils n'osent généralement pas utiliser ! Je suis contente de leur avoir donné la possibilité de communiquer en patois. Pour ce qui concerne le français, j'ai beaucoup admiré Lisa car elle a su persévérer ; elle essayait tout le temps de trouver le bon contact avec les enfants et, étant elle-même sportive, elle a utilisé les jeux, le football, les jeux en plein air pour gagner la confiance et l'affection de tous les enfants.
Pour conclure et résumer le tout, je dirais que l'initiative d’Esprit Tsotén est une expérience, soignée dans le détail... Bien sûr, il y a des choses à améliorer mais, en fin de compte, ce n'était que la première année, et on a le temps devant nous...

Marie Claire Chaberge


Esprit Tsotèn
Édition 2005

Du 4 au 29 juillet 2005, au chef-lieu d’Introd
Destinataires : enfants nés entre 1993 et 1998.
Toutes les activités concernées par le projet se dérouleront en français ou en patois. Parmi elles, citons les jeux, les promenades, les sports traditionnels, les musiques et les chants de chez nous, la découverte du milieu…
Prix pour une semaine: 150 e
Pour tout renseignement :
Communauté de montagne “ Grand-Paradis ”, 0165 92 18 05/13/14
Responsable du projet, Daniel Fusinaz, 338 34 35 889.

Daniel Fusinaz


Note
(1) Compte rendu de l'activité : “ Esprit Tsotèn ”, Introd, 28 juin - 23 juillet 2004

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