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Chers lecteurs

Cela n’a échappé à personne, la couverture de ce numéro est noire. Nous ne sommes pas passés par quatre chemins pour nous attaquer à un sentiment très fort : la peur, une émotion universellement partagée et communément associée à cette couleur.
« La peur est un phénomène psychologique à caractère affectif marqué, qui accompagne la prise de conscience d’un danger réel ou imaginé, d’une menace. » (Le Petit Robert)
La peur a d’innombrables déclencheurs ; celle engendrée par l’école touche indifféremment l’enfant, l’adolescent, les parents et les enseignants. Par exemple, qui peut affirmer n’avoir jamais été étreint par un sentiment d’anxiété plus ou moins intense la veille de la rentrée des classes ?
Avec le temps, on oublie la plupart des longues années passées sur les bancs de l’école, mais les peurs que l’on y a éprouvées ne sont jamais bien loin, prêtes à émerger du fond de notre mémoire. Ainsi, on se rend compte que la vie à l’école est truffée d’épisodes d’anxiété, allant du banal petit souci à la véritable peur. Cela peut parfois resurgir à l’improviste quand on se retrouve face à quelqu’un qui doit évaluer nos prestations. En fait, tous les jours chacun de nous est appelé à affronter des situations anxiogènes. Il en est ainsi en particulier quand notre destin ou une toute petite portion est entre les mains de quelqu’un qui a le pouvoir d’en décider. Apprendre à dominer cette peur, à la maitriser, à la gérer et à l’utiliser comme un outil est partie intégrante du métier d’élève.
À l’école, on ne peut pas se limiter à un centrage sur les compétences cognitives, car elles ne sont pas les seules à entrer en jeu dans le processus d’apprentissage ; il serait insensé de ne pas tenir compte également des compétences émotionnelles qui peuvent, de façon tout aussi efficace, le promouvoir ou bien le compromettre. Affectivité et apprentissage scolaire sont intimement liés.
Pour mieux intervenir afin de réduire l’anxiété et la peur, encore faut-il les reconnaître. Elles ne sont pas exclusivement la conséquence d’événements extérieurs, mais on les porte aussi en soi. En tant qu’enseignant il nous arrive, souvent bien involontairement, d’attiser les peurs de nos élèves et si on s’en rend compte, on se doit d’essayer de les apaiser afin de ne pas faciliter l’apparition de blocages. La prise de conscience permet de rechercher puis d’adopter des stratégies appropriées, en termes d’attitudes et de comportements, aptes à combattre les facteurs anxiogènes.
Dans son introduction aux Indicazioni per il curricolo per la scuola dell’infanzia e per il primo ciclo d’istruzione (09/2007), le ministre G. Fioroni rappelle que l’école a bien sûr la grande finalité d’éduquer en instruisant, de préparer la personne à sa vie future, afin de participer à la formation d’un adulte responsable, mais il ajoute : « La difficoltà di questo percorso è data dal disagio che molti giovani vivono: le paure, le incertezze, la solitudine, l’idea di una vita vuota e senza senso sono il sottofondo di quel malessere diffuso, espressione di un eccesso di avere e di una carenza di essere. »
Ceux qui ont la charge des élèves sont conscients de cette grande responsabilité, et il n’est pas rare que les enseignants soient de ce fait envahis par d’innombrables craintes, sans cesse alimentées par le sentiment de ne pas se sentir à la hauteur d’une telle mission.
Personne n’est à l’abri de l’emprise des émotions et de la peur en particulier, même ceux qui tiennent les rênes du pouvoir et qui se trouvent dans la position bien souvent incommode de décider même partiellement de l’avenir des autres. L’école c’est aussi cela ; elle est faite de relations socio-affectives, de rapports interpersonnels, de passion, d’ennui, etc. mais aussi de peurs.
Quand nous nous sommes attelés à ce thème, par un pur hasard, Chagrin d’école, le dernier ouvrage de Daniel Pennac est sorti. Le mauvais élève qu’il était se souvient notamment de ses peurs alimentées par l’école ; c’est pourquoi plusieurs de nos collaborateurs y font référence.

En cette fin d’année scolaire, nous vous souhaitons de passer de bonnes vacances !


Geneviève Crippa
Bruno Fracasso

 

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