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La classe verte, fruit d’une collaboration

Quand les parents et les experts collaborent avec les enseignants et leurs classes, chacun ayant clairement à l’esprit son propre rôle, le résultat ne peut être qu’une réussite capable d’essaimer. En fait, d’autres classes vertes voient le jour en Vallée d’Aoste.

Même si depuis longtemps les enseignantes de l’école d’Antey-Saint-André veillent à éduquer les enfants au respect de la nature, il faut reconnaître que le projet RANA est né de l’initiative d’un parent d’élève.
Au départ, ce qui ne s’appelle pas encore le projet RANA commence à germer dans la tête d’un papa qui assiste à l’aménagement du nouvel espace de sports et loisirs de la commune.
À l’époque, il remarque qu’à l’extrémité du terrain il y a encore un endroit qui semble n’intéresser personne : une zone humide qui risque l’assèchement. Il est d’autant plus convaincu qu’il est souhaitable d’éviter sa disparition, qu’il est garde forestier de la commune et est fortement motivé par la conservation de la nature.
Persuadé de la valeur éducative d’un tel endroit, il en parle à la maîtresse de son fils, puis le projet commence à mûrir et à prendre forme. Franco Trèves se charge de contacter un expert de la région, Ronni Bessi. Tous deux proposent à l’ensemble de l’école d’adhérer au projet “ Aula verde ” (classe verte).
C’est ainsi qu’il démarre en 2002 et aboutit le 20 mai 2004 à l’inauguration de la classe verte en présence des autorités régionales et communales, des parents et des sympathisants. C’est un moment fort pour les enfants de l’école : ils sont orgueilleux de voir que leur initiative arrive à sa consécration. De façon tout à fait officielle, la classe verte leur est donnée en gestion. C’est donc à partir de là qu’elle commence vraiment à vivre.

LES ACTEURS

Les enseignantes concernées
École de l’enfance : Erica Blanc, Aldina Charrière, Raffaella De Propris, Paola Navillod, Antonella Thabor.
École primaire : Piera Aymonod, Marisa Codazzi, Laura Noussan, Bruna Peaquin, Muriel Vallet.

Les élèves
23 de l’école de l’enfance ;
29 de tous les niveaux de l’école primaire.

 

EN QUOI CONSISTE UNE CLASSE VERTE ?

En général, les classes vertes sont une initiative à finalités éducatives, non seulement pour les enfants de la commune, mais aussi pour l’ensemble de la population de l’endroit et pour les touristes de passage. Elles doivent être situées à proximité des zones habitées, accessibles à tout le monde et offrir un concentré de nature, d’un haut niveau de bio-diversité, riche en espèces animales et végétales aptes à aiguiser la curiosité.
Les classes vertes ne doivent pas occasionner de fortes dépenses pour les collectivités locales. Pour celle d’Antey, l’Administration régionale a fourni des équipes d’ouvriers du corps forestier pour effectuer les travaux d’aménagement ; le matériel utilisé a été en grande partie de récupération.
Une fois que la classe verte est créée, la gestion est communale : il est important qu’elle soit prise en charge localement. Dans notre cas, même après l’inauguration, les élèves vont continuer à s’en occuper.

LA MISE SUR PIED D’UNE ACTIVITÉ DE COLLABORATION

La relation triangulaire entre l’enseignant, l’expert et l’élève n’a de sens que si une situation particulière d’apprentissage est envisagée. La classe verte est le fruit d’une collaboration à plusieurs niveaux dont la finalité principale est d’éduquer les nouvelles générations au respect de l’environnement. Pour ce projet de l’école d’Antey-Saint-André deux experts externes ont collaboré :
• un fonctionnaire régional qui œuvre habituellement sur place (il est connu dans la commune et est expert de l’environnement) et connaît bien le territoire ; il s’agit du garde forestier Franco Trèves ;
• un éducateur à l’environnement, spécialiste au niveau régional (et non local) : Ronni Bessi.

Lé minó y an propozó lé iór idé é i son itó écoutó

"L'aula verde": l'idé y é én poste ioù lé minó i pousissan ituguì la nateua dedén la nateua.
Dedén l'éve claa on pou vére lé béquie é lé plante: la létsée y é én éngranadzo complécó ioù on aprèn véo la diféénse y é émportanta pé la véya.
Quieutte y an cru ou projé é quieutte ché son émpléyé pé lo fae: lé minó y an propozó lé iór idé é i son itó écoutó.
Y é émportàn pé lé minó dé comprenne qué én travaillèn quieutte énseumblo ché pou portà a bon fén én projé, qué éntremèn on aprèn én moué dé bague é qué, comèn én queu lé cas dé la véya, i fo betà é chouvre dé régle. E totte sétte bague éa lé minó dé Antèi i lé spléccon i-z-otre minó qué i végnon vére la iór "aula verde".
Lé neutre minó ché sènton dé pleu par dé la véya dou veladzo perquié y an réalizó én-a coueugne émportanta pé lé antezàn é lé monseur qu'i végnon vezetà Antèi.
Franco Trèves


Le maire de la commune, interpellé dès le début, a adhéré immédiatement à l’initiative. Le conseil communal a proposé d’acquérir le terrain situé sur une propriété privée, à la lisière de la zone sportive à peine aménagée. L’approbation de toute la communauté est importante car, au-delà de l’activité des enfants, la classe verte doit être ressentie comme appartenant à tout le monde, et elle peut avoir des retombées touristiques. Le projet a donc pu démarrer grâce à une large participation des différents partenaires : la mairie, la direction didactique, l’assessorat… chacun dans le cadre de ses compétences spécifiques.

POURQUOI ENTRAINER LES ÉLÈVES DANS CETTE AVENTURE ?

Souvent, on croit que quelques rares activités en classe sont suffisantes pour éduquer les enfants à l’environnement et pour leur inculquer le respect de la nature, des animaux et de la végétation qui les entourent.
En réalité, une visite occasionnelle, une fois dans l’année, ne suffit pas pour engendrer cette émotion, nécessaire à une véritable sensibilisation.
On sait que les enfants sont profondément attirés par le monde animal ; les animaux peuvent jouer le rôle de médiateur entre l’école et le territoire. Pour les sensibiliser, il n’est pas indispensable de leur faire voir de près des marmottes, des chamois ou d’autres animaux qu’ils n’auront guère l’occasion de côtoyer ; les enfants peuvent aussi bien être fascinés par de simples têtards ou par des petits insectes qu’ils peuvent voir tous les jours. C’est à partir de là que Ronni Bessi a commencé. Il s’est présenté à eux comme un intermédiaire entre les humains et le monde animal. Il leur a appris à regarder autour d’eux et à apprécier ces petites choses vivantes qui bougent et évoluent dans un milieu naturel proche des élèves.

LES ÉTAPES DU PROJET

Au début, à plusieurs reprises, les enfants ont été accompagnés à pied pour aller observer sur place la rigole qui serpentait encore dans un petit terrain inculte situé non loin de l’école, et y découvrir un espace grouillant de vie, là où des grenouilles déposent leurs œufs.
Le journal de bord du projet RANA : “ Rispetto Ambiente Naturale Antey ”, écrit par les enfants de l’école primaire en raconte les différentes étapes. En voici quelques extraits.

Au début, pendant l’année scolaire 2002-2003

Nous, les élèves de l’école élémentaire d’Antey, en compagnie de nos enseignantes, nous avons accueilli volontiers l’opportunité qui nous était offerte d’apprendre à
respecter la nature : les végétaux et les animaux.
Comme première étape, nous nous sommes rendus avec nos enseignantes sur les lieux de notre future classe verte, avec les petits de l’école maternelle.
Nous avons observé de près les habitants de la zone humide : les grenouilles, les têtards, les insectes… Le garde forestier nous a fait découvrir et nous a appris les noms de certaines plantes qui poussent à l’intérieur et sur les rives du petit canal.
Ensuite, pendant l’année scolaire, nous avons reconstitué le milieu typique de la zone humide dans un aquarium installé dans le hall de l’école. Nous avons même pu observer la transformation des œufs de grenouille en têtards ! Nous avons trouvé l’expérience à la fois amusante et instructive.
À la fin de l’année scolaire, les enseignantes nous ont invités à donner un nom à notre projet. C’était une grande responsabilité, pour nous !
Après bien des discussions et des séances de vote, nous avons choisi “ RANA ”, qui se traduit en français par “ Grenouille ”. Il s’agit de l’acronyme de : Rispetto Ambiente Naturale Antey.
C’est un beau nom, n’est-ce pas ?

Pendant l’année scolaire 2003-2004

Nous voici de nouveau à l’œuvre, prêts à continuer le travail entrepris.
Mardi 23 septembre, au cours de la matinée, Franco et Ronni, nos deux experts nous accompagnent à l’endroit où devra voir le jour notre classe verte.
Quelle surprise ! Une équipe d’ouvriers du département régional des ressources naturelles est au travail pour réaliser notre projet. On nous explique que pour la fin du mois d’octobre, si les conditions météorologiques le permettent, tout devrait être prêt. Toutefois nous ne pourrons admirer notre classe verte vraiment finie qu’au printemps prochain.
Un étang servira de refuge aux animaux du milieu humide ; il y aura des grenouilles, des crapauds, des salamandres ainsi que des insectes, comme le dytique, la libellule et de nombreux autres, que nous apprendrons à reconnaître. Les roseaux disposés tout autour vont servir de refuge aux animaux des marais.
Avec nos experts, nous cueillons aux alentours des petites branches, des feuilles, des morceaux d’écorce des arbres ; nous ramassons de belles mottes de terre qui vont nous permettre d’observer les différentes couches du milieu marécageux. On nous explique que la partie de terre la plus sombre est celle qui est enrichie par les végétaux en décomposition.
Tout le matériel recueilli est ramené à l’école et, pendant l’après-midi, avec nos camarades de la maternelle, nous essayons de formuler quelques hypothèses sur ce qu’on pourrait en faire, en pensant aussi que notre travail pourrait être utile à d’autres.
Les activités liées à la classe verte nous permettent d’aborder des connaissances dans différentes disciplines, en sciences, en mathématiques, mais aussi en italien et même en patois…

En sciences

À l’occasion de la sortie du 23 septembre, nous avons coupé quelques feuilles des plantes du marécage.
En classe, avec nos camarades, nous les avons conservées entre des pages de journal pour les faire sécher correctement. Les petits de la maternelle ont réalisé une affiche.
Pour en savoir davantage, nous les élèves de la pluri-classe de quatrième et de cinquième années, nous nous sommes documentés à la maison dans des livres, des encyclopédies et quelqu’un est même allé sur Internet. Nos familles nous ont aidé à trouver les noms en patois.
Par petits groupes, nous avons commencé à rédiger la carte d’identité relative à chaque plante cueillie. D’abord nous avons sélectionné les informations, puis nous les avons notées au brouillon et recopiées à l’ordinateur.
Nous avons élaboré des fiches pour le roseau, et d’autres herbes et buissons, par exemple ; mais aussi pour les arbres des zones humides.
Lors d’une des premières sorties, nous les enfants de l’école de l’enfance et des classes de première, deuxième et troisième années de l’élémentaire, nous avons été intrigués par la vie des animaux de notre classe verte et nous nous sommes posé toute une série de questions auxquelles nous avons essayé de trouver des réponses : en formulant des hypothèses ; en observant directement le comportement des animaux ; en interviewant le garde forestier Franco Trèves ; en recherchant des informations et des images dans les livres ; en recherchant des informations sur Internet ; en posant des questions à nos parents ; en prenant des photos ; en discutant entre nous pour décider comment rédiger les fiches d’identité, de façon à les rendre “ lisibles ” pour tous ; en dessinant des animaux ; et enfin en écrivant les fiches d’identité.
Nos objectifs étaient les suivants : connaître les “ habitants ” du marécage ; savoir mettre en ordre et classer ; savoir collaborer sur un objectif commun ; savoir se comporter et agir dans des environnements et dans des groupes différents ; développer respect et amour pour la nature et l’environnement.
Après plusieurs sorties, avec l’aide des intervenants externes et des enseignantes, nous les élèves du primaire avons pu rassembler des informations et élaborer une fiche pour chaque animal. Tandis que les enfants de la maternelle faisaient les dessins, les plus grands, ceux de l’élémentaire ont écrit les textes. Le tout a été travaillé en groupes mixtes dans les locaux de l’école élémentaire, et en groupe hétérogène à la maternelle.

En mathématiques

Nous avons profité d’une sortie pour faire un peu de mathématiques à partir d’une situation concrète et d’une manière différente. Nous avons mesuré la longueur du trajet qui sépare l’école de la zone humide, puis le périmètre de notre “ classe verte ”. Nous avons ainsi compris la signification de décamètre carré.
En nous servant de la roue métrique, nous nous sommes aperçus que pour parcourir un kilomètre, il suffit de partir du portail de l’école et d’aller jusqu’à la buvette du terrain de sports. Nous n’avions jamais imaginé pouvoir nous amuser autant en faisant des mathématiques !
Voici le plan de notre classe verte.

Les mesures à respecter

Enfin, tous les enfants ont été d’accord pour faire une liste des mesures à respecter et des actions interdites dans la classe verte : il est interdit de jeter des pierres dans l’eau ; de toucher les œufs de grenouille ; de capturer des insectes ; de hurler et d’effrayer les animaux ; de pêcher ou de nager dans l’étang…

Conclusion

La réussite de ce projet est un bon point de départ pour la diffusion de ce type d’initiative dans toute la région. En effet, plusieurs autres sont déjà en projet.


Les enseignantes d’Antey- Saint-André

Ronni BESSI
Fonctionnaire du Bureau régional de la Faune sauvage, expert externe.

Franco TRÈVES
Garde forestier, expert externe.

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