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Vers l’adaptation des curricula nationaux : aspects curriculaires de l’enseignement bi-/plurilingue

Des propositions factuelles pour essayer de dégager les principes généraux qui devraient inspirer l’opération des adaptations. Une profonde révision des curricula linguistiques s’impose sans oublier les problématiques différentes auxquelles chaque niveau scolaire est confronté.

Deux conduites différentes peuvent être assumées face à la décision du Gouvernement de suspendre la réforme des cycles scolaires et des curricula nationaux : celle d’interrompre, à notre tour, toute réflexion sur les adaptations locales suivant les articles 39 et 40 du Statut Spécial pour la Vallée d’Aoste ou celle d’engager, de poursuivre et d’approfondir l’élaboration d’hypothèses de façon à être prêts, le moment venu, pour les futures adaptations. De toute évidence, cet article s’inscrit dans la deuxième perspective. Les propos qui vont suivre se situent en continuité par rapport à un premier texte publié dans la revue Informairrsae (Cavalli 2001(1)) où j’ai essayé de dégager les principes généraux qui devraient inspirer l’opération des adaptations. Le but de cet article est de faire des propositions factuelles par rapport au futur curriculum dans une optique essentiellement bi-/plurilingue.

Quelles hypothèses peut-on alors faire par rapport à l’adaptation des curricula ?

Soulignons, en premier lieu, ce qui, au cours du projet Disciplines et Bilinguisme du SIT, a été appelé l’" effet de loupe " de l’éducation bi-/plurilingue, c’est-à-dire la conscience (dans le sens du terme anglais awareness) plus aiguë que ce type d’éducation induit vis-à-vis de phénomènes langagiers par ailleurs largement présents, mais moins visibles ou sous-estimés dans les classes traditionnelles :
pour n’en citer que quelques-uns, le rôle de la langue dans l’acquisition des concepts disciplinaires, les interférences entre le langage ordinaire et le langage scientifique, les types de discours (oraux et écrits) utilisés dans les disciplines, les rhétoriques disciplinaires, les différents types d’interactions et de discours employés à l’intérieur de la classe.
Cet effet de loupe représente une plus-value de l’éducation bilingue qui se joue aussi bien sur le versant de l’enseignement (prise de conscience beaucoup plus approfondie des enjeux disciplinaires) que sur celui de l’apprentissage (meilleure gestion des processus).

Les dimensions transversales du curriculum

Dans une optique bi-/plurilingue, les adaptations des curricula nationaux devraient envisager, en premier lieu, des mesures de rationalisation visant une économie, une cohérence et un allègement globaux - mesures, par ailleurs, valables aussi bien dans une perspective moins orientée vers le plurilinguisme.

Ces mesures concernent les articulations plurielles qu’il s’agit de mettre en œuvre (cf. illustration) :
• entre les langues elles-mêmes en tant que disciplines ;
• entre les disciplines non linguistiques entre elles ;
• entre les langues et les disciplines non linguistiques.

Cet ensemble de mesures visent, à travers divers décloisonnements interdisciplinaires, aussi bien une exploitation - au niveau de l’enseignement - des transversalités multiples qui parcourent le curriculum que, en dernière instance, une facilitation des transferts de connaissances et de compétences - au niveau de l’apprentissage - grâce à la mise en place de stratégies adéquates.
Pour ce qui est de l’aire des enseignements linguistiques, la pédagogie intégrée des langues (Roulet 1980), déjà pratiquée à l’école moyenne du Val d’Aoste, permet d’assurer l’élaboration et la réalisation d’un curriculum linguistique unitaire, projeté comme un tout(2). Les langues de l’école valdôtaine offrent un terrain particulièrement fertile à cette pédagogie de par leur parenté typologique : sans parler de la filiation directe entre patois et français, on passe d’une langue romane - l’italien - au français, qui est considérée comme la moins romane des langues romanes, et ensuite à l’anglais, réputée, de par l’étendue de son vocabulaire de dérivation latine, la moins germanique des langues germaniques. Le passage d’un code à l’autre se fait donc, de façon très harmonieuse, de couples de langues plus similaires à d’autres qui le sont moins.
Le passage se fait très graduellement aussi sur une autre dimension qui concerne le statut linguistique des langues enseignées à l’école : d’une langue périphérique (régionale et vernaculaire : patois ou dialecte) à une langue centrale (nationale : l’italien) à une langue supercentrale (internationale : le français) à une langue hypercentrale (mondiale : l’anglais) (de Swaan, cité par Calvet 1999, p. 73-81). Le plurilinguisme valdôtain peut ainsi être défini intégralement " vertical " s’appuyant en partie sur un apprentissage spontané (pour le patois/dialecte et l’italien) et en partie sur un apprentissage programmé (le français, l’anglais et l’italien aussi).
Une seconde aire de rationalisation est représentée par les différents champs disciplinaires où une optique interdisciplinaire devrait permettre, de façon analogue à ce qui s’opère dans l’aire linguistique, de faciliter la réalisation de transferts de connaissances et compétences(3). Ces derniers peuvent avoir lieu à différents niveaux :
- celui des concepts similaires entre lesquels il s’agit d’établir des passerelles cognitives : souvent les différentes disciplines travaillent sur des champs conceptuels en tout ou en partie communs ou pour le moins contigus (surtout pour ce qui est de disciplines voisines comme l’économie et l’histoire ou la biologie et la chimie) de façon tout à fait cloisonnée sans qu’il y ait communication, partage, renforcement réciproque ni mise en évidence des spécificités ;
- celui des opérations cognitives requises pour les apprentissages disciplinaires (observer, comparer, calculer, anticiper, planifier, négocier, analyser, comprendre,...), qui constituent un soubassement tout à fait transversal que les enseignants auraient intérêt à développer d’un commun accord, selon les spécificités de chaque discipline aussi, de façon à les asseoir solidement et à réaliser une économie cognitive globale chez les élèves ;
- celui, enfin, des divers outils et moyens de représentation conceptuelle : tableaux, graphiques, diagrammes, frises chronologiques, etc. 
Enfin la dernière aire de rationalisation, particulièrement intéressante pour notre propos, est représentée par cette autre dimension transversale qui se trouve au croisement de l’aire linguistique et de l’aire des disciplines : la dimension linguistico-cognitive. C’est dans cette aire que se situent toutes ces opérations, à la fois cognitives et linguistiques, qui traversent l’ensemble du curriculum : lire un texte, le résumer, construire un raisonnement, produire une argumentation, écouter une explication, écrire un compte rendu, faire un exposé...
Dans le cadre d’une éducation bi-/plurilingue, l’intérêt de cette aire réside dans le fait qu’elle se conjugue en deux ou trois langues.
Cela suppose qu’il y ait une collaboration étroite entre les enseignants de disciplines et les enseignants de langues de façon à définir les rôles respectifs - et complémentaires - de chacun face à des questions telles que, par exemple, les apports de connaissances linguistiques et langagières, la réflexion sur la langue et sur son usage, la correction des erreurs ... (Py et Serra 1996, Gajo et Serra 1999).
C’est également dans ce cadre qu’il est possible aux enseignants de discipline, en collaboration avec leurs collègues de langue, de réfléchir, en premier lieu, sur la dimension langagière de l’apprentissage disciplinaire et de définir, ainsi, les types de discours écrits et oraux utilisés et les activités discursives les plus fréquentes dans leurs disciplines, d’établir et surtout d’expérimenter les modalités les plus intéressantes d’alternance des deux/trois langues qui soient fonctionnelles pour une meilleure acquisition disciplinaire, de faire place à des activités de médiation non seulement entre genres de textes spécialisés (par exemple, entre un discours expositif et un graphique en sciences ou entre un discours narratif et une frise chronologique en histoire), mais médiation également entre discours en deux/trois langues, comme autant de moyens de reformulation des concepts disciplinaires (Coste et Pasquier 1988, Coste 1994 et 2000).

Les curricula linguistiques

Mais, outre les mesures qui viennent d’être décrites, qui articulent les différentes disciplines entre elles et qui font appel à diverses formes d’interdisciplinarité, les curricula linguistiques eux-mêmes nécessitent une profonde révision qui leur permette de viser réellement la construction d’une compétence bi-/plurilingue auprès des élèves. Les spécificités disciplinaires des enseignements linguistiques devraient, en effet, changer de manière assez radicale dans une éducation bi-/plurilingue.

Les répertoires linguistiques des apprenants

Considérons, en premier lieu, non pas les langues de l’école, les langues dites de référence (Dabène 1994, p. 21), mais les langues que l’école accueille : les répertoires linguistiques, de plus en plus variés, des apprenants.
En repensant les curricula linguistiques, il importe de ne pas oublier leur valorisation et leur prise en charge didactique : la diversification de ces répertoires en entrée est, alors, à envisager en termes de richesse à exploiter et de complexité ou de complexification à gérer plutôt qu’en termes de " complication ". Une éducation linguistique ne peut, en effet, solidement se construire ni efficacement se réaliser si la langue parlée à la maison ne trouve pas sa place (affective bien sûr, mais également didactique) à l’école. La L1 de l’enfant représente, en effet, la base à partir de laquelle il est possible de valoriser son identité (linguistique et culturelle) et sur laquelle s’appuie la construction et l’élargissement de ses compétences linguistiques et langagières et de leurs dimensions " méta " (argumentations largement étayées par Cummins 2000). Des indications et des activités du type de celles qui sont proposées dans le cadre du language awareness (Hawkins 1996) et de l’éveil aux langues et aux cultures pourraient représenter d’utiles moyens pour intégrer les langues des élèves dans la classe(4).
En Italie les instructions officielles encore actuellement en vigueur pour l’école de base soulignent déjà largement cet aspect et l’exigence que l’école s’en charge. Il nous semble qu’une éducation bi-/plurilingue devrait y prêter une attention particulière. En effet, les aspects de valorisation identitaire sont fondamentaux en vue aussi bien de la formation des apprenants que, secondairement, de leur attitude envers les langues et, plus en général, envers l’école : ils représentent, en ce sens, un facteur d’intégration et de facilitation du succès scolaire.
Mais il ne faut pas oublier que la L1 de l’apprenant peut également constituer un atout didactique particulièrement intéressant. Ainsi, au Val d’Aoste, par exemple, le substrat francophone que représente le patois de certains élèves patoisants devrait être davantage exploité à l’école : la filiation entre le dialecte francoprovençal et le français offre, en effet, un raccourci cognitif qui permettrait d’éviter que des apprenants patoisants apprennent le français " en passant par " l’italien.
Dans cette optique, le curriculum valdôtain devrait également prendre en compte l’italien et le français en tant que " langues d’accueil " pour les enfants étrangers et prévoir les mesures aptes à assurer le maintien des langues d’origine, à l’intérieur soit du quota local soit dans la partie facultative du curriculum. C’est là le plus grand défi que pourrait relever une école bi-/plurilingue, qui, mieux que d’autres, devrait être armée dans ce domaine pour trouver des solutions originales et d’avant-garde.
Pour ce qui est, de façon spécifique, des langues de l’école, des changements importants, mais subtils, des réorientations s’imposent pour qu’elles s’insèrent de plein droit dans la dimension bi-/plurilingue.

La langue italienne

Pour la langue italienne, il faut se demander en quoi son enseignement se différencie par rapport au contexte italien : en effet, si, d’un côté, à l’italien est " soustraite " la partie des domaines disciplinaires qui sont enseignés en langue française, de l’autre, il est démontré que la dimension bi-/plurilingue non seulement ne devrait pas nuire à la compétence en cette langue(5), mais qu’elle devrait représenter, si possible, un plus pour elle: une plus grande flexibilité mentale de la part des apprenants, une sensibilité métalinguistique plus développée, une capacité plus étendue d’analyse des informations linguistiques et d’abstraction ...
Il faut alors que le curriculum de l’italien mise lui aussi sur le développement des compétences et des stratégies qui permettront aux élèves valdôtains d’exploiter au maximum le contexte plurilingue de l’enseignement et leur propre répertoire plurilingue au profit de la langue italienne.

La langue française

Le curriculum du français est, lui, profondément à repenser : en effet, le passage du simple enseignement du français à un enseignement en français, pour anodin qu’il puisse paraître, suppose en vérité un changement total d’optique pour le professeur de langues(6). Dans le passé, le professeur de français était le seul " maître à bord " de l’acquisition linguistique : c’était lui qui établissait la progression des apprentissages en réglant la quantité et la qualité de l’input, en structurant les activités, en évaluant l’output... Dans une éducation bi-/plurilingue, les acquisitions linguistiques ne se font pas exclusivement dans la classe de langue : toutes les disciplines y concourent avec leurs langages spécialisés, leurs manuels et leurs activités.
Il faut donc que l’enseignement du français, d’un côté, soit en cohérence avec cette nouvelle perspective. Ainsi, une orientation exclusivement communicative et fonctionnelle, fondée sur la réalisation d’actes de paroles liés à la vie quotidienne, telle qu’elle est encore prévue, par exemple, dans les programmes pour l’école moyenne valdôtaine, orientation dont les limites en classe de langues ont déjà été amplement démontrées par la recherche, représente une ressource inadéquate et exiguë : elle limite les potentialités expressives des élèves et les possibilités didactiques offertes par le cadre d’une éducation bi-/plurilingue.
En effet, l’enseignement du français devrait se charger de la progression des apprentissages linguistiques en relation aussi avec les apprentissages disciplinaires en se donnant, au moins en partie, les objectifs qui concernent la dimension langagière des autres disciplines. Par ailleurs, dans le domaine de l’enseignement des langues étrangères, une proposition allant dans le sens de leur utilisation à l’intérieur des disciplines a déjà été efficacement argumentée par Widdowson (1981) : les disciplines non linguistiques offrent, en effet, de vastes domaines où les situations de communication et d’apprentissage langagier sont beaucoup plus proches de la vie quotidienne et des préoccupations des élèves que celles que peuvent proposer des approches communicatives plus classiques.
Ainsi, une approche visant à l’acquisition de compétences dans le fonctionnement des différents types de discours, aussi bien oraux qu’écrits, telle qu’elle est proposée par l’école de Genève (Bronckart 1985 et 1986), s’appuyant sur une diversification textuelle finalisée à l’acquisition de concepts disciplinaires (Coste et Pasquier 1988) semble mieux répondre aux besoins d’une éducation bi-/plurilingue qu’une approche communicative traditionnelle.
D’un autre côté, ce que l’enseignement du français apporte aux autres disciplines, en termes de soutien langagier, devrait lui revenir sous forme d’élargissement des plages de temps et des domaines dans lesquels se réalisent les acquisitions linguistiques, à condition, bien sûr, que soient trouvées les modalités pour que la capitalisation de ces acquisitions puisse avoir lieu.
Cela suppose, comme il l’a été explicité ci-dessus, une grande collaboration entre le professeur de français (de concert avec son collègue d’italien) et ses collègues des autres disciplines sur cette aire commune qui est représentée par la dimension transversale de la langue.
Corollaires à l’élaboration du curriculum de français, mais très loin d’être secondaires, d’autres aspects conditionnent fortement l’enseignement de cette langue aussi bien au Val d’Aoste qu’ailleurs : nous entendons par là le type de norme linguistique à choisir et le rapport à cette norme.
En effet, s’il est évident que la variété de français qui était parlée dans le passé au Val d’Aoste se différenciait fortement de la variété parlée en France et notamment à Paris, ce français local n’est plus actuellement le modèle de référence, substitué qu’il a été, au cours du temps, par le français " métropolitain ", langue-mythe, inatteignable et source intarissable d’insécurité linguistique (essentiellement formelle(7), en suivant Calvet, 1999, p. 144-182) même dans la société valdôtaine. Or d’autres " modèles " linguistiques seraient franchement plus réalistes pour la situation valdôtaine, par exemple, le français parlé en Suisse avec lequel le français valdôtain partage le substrat francoprovençal. Si ce n’était que, dans la francophonie, et c’est là une grande limite, la seule variété fortement valorisée (et ce même en Suisse) est celle de France.
En partie lié à ce problème de la norme à choisir, nous retrouvons celui du rapport à la norme : les francophonies périphériques, dont le Val d’Aoste fait partie, souffrent, parfois, d’être, dans ce domaine, plus royalistes que le roi ... de France. L’attention à une " qualité de la langue " mal conçue peut atteindre, en effet, des sommets d’exigence qui, au niveau scolaire, tuent tout le " plaisir de la langue " : la tolérance à l’erreur devient alors très faible et l’attention aux aspects de " bas niveau " (par exemple, l’orthographe) excessive, même à des moments où toutes les compétences cognitives pour gérer la complexité de l’ensemble de l’orthographe française ne sont pas encore présentes (Catach 1989, p. 48 et 1995 p. 114). Ce genre de problèmes, souvent irrésolus, tus ou refoulés, ont une grande incidence sur les attitudes par rapport aux langues et devraient être pris en compte également dans la construction du curriculum.
Dans ce domaine, l’école a un grand rôle à jouer : ses pratiques d’enseignement peuvent avoir, en effet, des retombées également au niveau de la société. C’est l’école, en effet, par la façon dont elle œuvre dans le domaine des langues, qui peut contribuer à changer ou à réorienter les représentations que l’on se fait des langues en présence et, notamment, de cette langue au(x) statut(s) en partie indéfini(s), flou(s), parfois non partagé(s) ou, carrément, réfuté(s) qu’est le français au Val d’Aoste.

La langue étrangère

Quant à la langue étrangère, soulignons, d’abord, l’intérêt de ce nouveau code pour le curriculum linguistique qu’il contribue à enrichir, à différencier et à ouvrir vers le plurilinguisme.
Son curriculum aussi devrait faire l’objet d’une adaptation : une langue, venant en troisième position et s’insérant précocement dans un curriculum, qui plus est, déjà bilingue, ne devrait pas suivre à l’identique le parcours classique d’enseignement-apprentissage d’une langue étrangère (Coste 1991 et 1998, Conseil de l’Europe 1996). Il est donc important d’orienter son enseignement vers la recherche de moyens et de stratégies pour profiter au maximum du cadre bilingue : par exemple, à travers une approche moins " classique " et traditionnelle(8), une progression plus rapide et diversifiée capitalisant les acquis réalisés dans les deux autres langues de l’école. Et, surtout, la L3 devrait, très rapidement, être utilisée, au même titre que le français, dans l’apprentissage des disciplines.
Il importe, encore, que la dimension " enseignement de la langue " soit conjuguée et étroitement articulée avec la dimension " enseignement en langue ".
Cette considération a de lourdes implications, car la cohérence doit être poursuivie parallèlement à différents niveaux :
- celui des curricula des langues et des disciplines;
- celui des matériels didactiques ;
- celui de la formation, initiale et continue, des enseignants.

Il ne faudra pas oublier, enfin, dans la construction curriculaire bi-/plurilingue, que chaque niveau scolaire est confronté à des problématiques différentes : l’école maternelle aborde le problème de l’acquisition d’une L2 à un moment où l’enfant est encore en train d’acquérir sa L1 et, en même temps, le langage (Decime 1994 et De Weck et al. 2000); l’école primaire doit gérer le délicat passage à l’écrit en deux langues parallèlement (Floris 1994) ; l’école secondaire doit assurer un enseignement des disciplines en L2 à un moment du parcours curriculaire où les concepts disciplinaires se font de plus en plus précis et exigeants du point de vue de leur formulation conceptuelle et linguistique (Porté, 1998).

Marisa Cavalli
Professeur de français détachée auprès de l’Institut Régional de Recherche Educative du Val d’Aoste IRRE-VDA.

Bibliographie
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Catach, N. (1989), Les délires de l’orthographe, Plon, Paris, 1989.
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Calvet, L.-J. (1999), Pour une écologie des langues du monde, Plon, Paris, 1999.
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Coste, D. (1991), " Diversifier, certes … ", in Coste, D. et Hébrard, J. 1991, p.170-176.
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Notes

(1).Il est possible de lire le texte de l’article sur le site de l’IRRE à l’adresse suivante : http://www.irre-vda.org/irre/info10.cfm
(2) Pour des approfondissements, cf. Cavalli éd 1998.
(3) Pour un approfondissement des enjeux, et des difficultés aussi, de cette perspective interdisciplinaire, voir Rey 1998 et Perrenoud 1998.
(4) Pour une revue de l’Awareness of language, de ses développements et de ses diverses adaptations dans les pays francophones, voir Moore 1995.
(5) Sur la base de l’hypothèse de l’interdépendance des langues du répertoire de l’apprenant et de l’existence aussi bien d’une compétence commune sous-jacente que d’un système opérationnel commun (voir, à ce propos, les dernières mises au point de Cummins 2000).
(6) Pour un approfondissement sur le rôle du professeur de français langue seconde dans le cadre de l’éducation bi-/plurilingue valdôtaine, voir Coste et Py 1998.
(7) Alors que certains patoisants sembleraient plutôt souffrir, selon la catégorisation de Calvet (1999) d’une insécurité statutaire, le patois n’étant pas ressenti, dans certains cas, comme une langue (Cavalli et al., à paraître).
(8) Certaines classes de ce que les élèves eux-mêmes ont appelé "franglais" au niveau de l’école moyenne et l’intégration de l’anglais dans des projets interdisciplinaires ont assez montré les potentialités d’un enseignement de la troisième langue qui fasse confiance aux compétences déjà acquises par les élèves en italien et en français et qui, en misant sur des stratégies de transfert, vise à une progression moins canonique, moins simpliste et plus rapide.

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